Retour au sources- Suite [TERMINE]

Pendant tout le trajet, du parc à l’infirmerie, Emma était resté droite aux côtés de Jean, l’aidant lorsqu’elle en avait besoin et tentant au mieux de faire de sa mince silhouette une présence rassurante. Jamais les hectares de terrains, les couloirs à franchir jusqu’aux sous-sols ne lui avaient semblés si longs. Frustration suprême ; De toute ce même chemin, elles n’avaient croisés personne, niet, 0, rien et personne qui aurait pu venir en aide à la brunette, et ainsi dispenser Emma de tenter de la soigner, alors que ce n’était certainement pas dans ses talents. Elle amènerait l’inconnue à Xavier, évidemment, mais entre-temps, elle ne la laisserait pas ainsi, blessée et vulnérable, ne serait-ce que par gentillesse… Gentillesse ? Mais c’était quoi ça, la nouvelle manie de la jeune Frost habituellement reconnue pour être la première à envoyer promener une tâche qui ne la satisferait pas, elle et elle seule ?

« Emma Frost. »

Prononça simplement la jeune femme à la porte de l’infirmerie, qui s’ouvrit dès qu’elle eu bel et bien certifié qu’Emma possédait les droits nécessaires pour être à cet endroit. Finalement, Jean avait presque de la chance de ne pas être tombée sur une élève. Avec un fin sourire, Emma traîna Jean dans l’infirmerie, admirant pour la première fois depuis son arrivée à l’Institut ce lieu des plus technologique. Certes, elle savait ou se trouvait l’infirmerie, et l’utilisation de désinfectant et de bandages n’avait rien d’extrêmement complexe, mais jamais au cours des mois passés elle n’avait eu la nécessité de venir en ces lieux.

*Heureusement…*

La salle blanche, les instruments de qualité, les lits, tous individuels, blancs… Bref, ils ne leur manquait que les attaches aux quatre coins, et Emma y revoyait avec horreur le genre de pièce ou, enfant, seule et désespérée, elle avait passée plusieurs mois, entourés de gens qui prétendaient vouloir son bien alors qu’en fait, ils se contentaient de lui injecter le plus de morphine possible. Dort petite, tout ira bien pour toi, mais surtout pour nous, tant que tu seras endormie…
Si ce n’était des lits apparemment privés d’attaches, la principale différence entre ce souvenir pénible de la jeune femme et le moment présent était que, malgré son sale caractère, sa froideur habituelle et surtout son penchant pour le ‘chacun pour soi’, à ce moment précis Emma voulait réellement le bien de la jeune femme, quitte pour cela à fouiller comme une imbécile dans chaque armoire qui lui tomberait sous la main.

« Assis toi là… »

Suggéra la jolie blonde alors qu’elle amenait Jean près d’un des lits, lui envoyant un léger sourire avant de se retourner, faisant un instant dos à la brune pour regarder autour d’elle.

« Est-ce que tu pourrais me dire si tu as quelque chose de cassé ? »

Demanda celle qu’on surnommait la Reine Blanche en reposant un instant son regard sur Jean, s’aventurant ensuite à ouvrir, tour à tour, les armoires près. Elle avait auparavant remarqué le peu de conversation de la jolie brune, qui semblait plus perdue qu’autre chose, mais elle ne perdait pas espoir. Quelque chose arriverait bien à arracher à l’inconnue quelques morts. Et bien que savoir exactement si l’on avait quelque chose de cassé relevait d’études médicinales, bafouiller qu’on avait mal au bras était nettement plus facile. Avec un sourire satisfait qui ne passa pas inaperçu sur le gracieux visage de la Mutante, Emma sortit une bouteille de désinfectant d’un placard, empoignant par la même occasion plusieurs buvards à porter de mains. Désinfecter les plaies n’était jamais le moment le plus intéressant…

De sa démarche tranquille, identique malgré le fait qu’elle fut plus stressée qu’à l’ordinaire, Em’ rejoignit Jean, et posa sur le lit les produits de soin qu’elle avait trouvé. Doucement, elle ouvrit la bouteille, versa un peu de liquide sur le premier buvard, et le leva à la hauteur des yeux de la brune.

« Je le fais ou tu le fais ? »

Elle se laissa aller au soutien de cette jeune femme blonde qui lui était inconnue jusqu’à l’infirmerie. Lieu qu’elle connaissait particulièrement bien pour y avoir passé presque la moitié de sa vie. Le chemin qu’elles avaient empruntés jusque là ne l’avait pas marquée, elle était trop faible pour faire attention à ce qui l’entourait, mais l’arrivée dans l’infirmerie lui fit une étrange sensation. Des images, des phrases lui revenaient en tête. Une jeune femme rousse, de dos penchée sur un microscope, elle. Un jeune homme brun portant des lunettes en quartz de rubis l’a regardant amoureusement sur le pas de la porte, lui.

[flashback]
Sentant sa présence elle avait relevé la tête et s’était tourné pour lui faire face, un sourire illuminant son visage fatigué. Elle portait comme toujours cette blouse blanche de scientifique et ses petites lunettes carrés lui donnant un air sévère d’intellectuelle. Elle savait qu’il adorait la regarder travailler, il aimait la voir avec ses lunettes. Elle était « sa petite scientifique » comme il aimait l’appeler.

Sans se parler ils s’étaient compris, rien qu’un regard, un seul regard et ils perçaient les pensées de l’autre. Ce n’était pas de la télépathie, c’était simplement l’amour, et la connaissance de l’autre. Il la regardait intensément à travers ses lunettes, même sans voir ses yeux elle savait que son regard débordé d’amour, il lui donnait tellement.

« J’ai presque fini » avait elle dit dans un souffle, sachant qu’il l’attendrait, la regardant comme il le faisait si souvent.

Elle s’était retournée et s’était repenchée sur ce microscope. Elle était en train de noter la dernière donnée quand elle avait senti son souffle sur sa nuque. Il était juste derrière elle. Elle releva la tête, sachant très bien qu’il ne la laisserait pas continuer à travailler très longtemps. Il déposa un tendre baiser dans son cou puis susurra ces deux mots qu’elle aimant tant entendre : « Je t’aime ». Elle était perdue.

Ce soir là, ils n’avaient pas quitté de suite l’infirmerie, et ce soir là, elle n’avait jamais finit de noter ces données.
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La jeune femme blonde la fit asseoir, perdue dans ses pensées qui revenaient peu à peu, elle s’était laissée faire, le regard fixé sur le sol immaculé. Elle la questionnait tout en ouvrant des placards. Elle essaya de reprendre possession de son corps et releva lentement la tête vers la jeune femme blonde. Si elle avait quelque chose de cassé, oui, mais personne ne pouvait le guérir. Ou peut être si. Une personne, une seule. L’être le plus sage et paternel qu’elle n’ait jamais connu.

Pour unique réponse elle réussit à lever ses mains ensanglantées. Physiquement c’était ce qui la faisait le plus souffrir. Ses blessures à la tête ou sur le reste de son corps n’étaient rien par rapport à la douleur que lui provoquait ses mains à la peau arrachée.
Après avoir apporté tous pour désinfecter ses plaies la jeune femme blonde, la questionna une nouvelle fois. Ses paroles traversant encore l’esprit de la jeune malade sans s’y ancrer.
Elle ferma les yeux, laissant cette femme s’occuper de ses plaies.

Elle ne ressentait presque pas la douleur que produisait le buvard d’alcool sur ses plaies à vif. Elle était comme endormie, comateuse, la seule chose qu’elle ressentait étant le trouble dans son esprit, le brouhaha s’installant de plus en plus, l’impression de n’être plus qu’un fantôme prisonnier d’autre chose.

En sortant de la salle des dangers, Scott se rendit d’un pas lent aux vestiaires. Il n’avait que faire du sang qui coulait sur son visage ni de la douleur que le coup de Logan avait provoquée. C’était comme si ces deux sensations conjuguées le rendait plus vivant qu’il ne l’avait été depuis bien des semaines. Certes la leçon était dur à avaler mais elle semblait avoir fait un minimum d’effet sur le jeune homme, un minimum… C’était déjà ça… Il pénétra dans la pièce et cette fois-ci ne claqua pas la porte derrière lui. Se rendant au lavabo, surplombé par un énorme miroir il observa une nouvelle fois son reflet dans le miroir. Un sourire ironique gagna ses lèvres, non vraiment celle-là il ne l’avait pas volée.

Il retira ses gants en cuir et ses lunettes, fermant aussitôt les yeux pour éviter toute déflagration et les paupières toujours closes il ouvrit à tâtons le robinet et se pencha vers le jet pour nettoyer son visage ensanglanté. L’hémorragie, si elle n’avait pas stoppée, avait au moins eu le mérite de diminuer et l’eau froide eut vite fait d’amoindrir encore le flot sanguin et d’apaiser la douleur. Quand il releva le visage, il chercha d’une main de quoi l’essuyer. Effleurant du bout des doigts une serviette, il la saisit et se sécha. Il put ensuite rechausser ses lunettes en quartz. Il ressentait toujours un léger picotement au nez, il lui semblait que Logan y avait été moins fort que prévu mais un nouveau saignement de nez vint contredire tout de suite cette théorie.

*Shit…*

Il se tourna vers son casier pour en extraire un mouchoir et l’appliquer contre son nez douloureux. Encore une mauvaise journée qui s’annonçait. Mais ne l’étaient-elles pas toutes depuis qu’elle n’était plus là ? Etouffant un nouveau soupir, le millième depuis qu’il était debout il prit le parti de se diriger vers l’infirmerie, le crochet de Logan ayant rendue la visite obligatoire. Tout en longeant les couloirs il tentait de refouler les souvenirs qui ne cessaient de l’assaillir chaque secondes. Tout ici était bien trop emprunt d’elle et peut-être la solution résidait-elle dans l’éloignement. Peut-être devrait-il quitter l’institut, sa famille, pour enfin réussir à se reconstruire.

[Flash-back]

« Scott ! »

Le jeune homme, qui gardait un œil attentif sur ses troupes qui se préparaient à subir un entraînement en salle des dangers se tourna vers la personne qui venait de l’appeler. Il aura pu reconnaître sa voix entre milles.

« Hum ?! »

Belle, à couper le souffle, c’était tout ce qu’elle lui inspirait à cet instant.

« Ororoe et moi on part en mission… On devrait être de retour pour le dîner… »

Elle s’était rapprochée de lui et l’envie de la prendre dans ses bras et de capturer ses lèvres dans un baiser l’avait tenté pendant un moment mais ils se faisaient un devoir de garder ça pour quand il se retrouvaient seul.

« Bien… »

un sourire, un regard…

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Arrivé devant la porte de l’infirmerie, celle-ci coulissa pour lui laisser le passage. Il franchit le seuil puis stoppa. Il y avait déjà quelqu’un à l’intérieur. Emma… Accompagnée de… Impossible… Non… Ca n’avait pas de sens… Encore un tour de son esprit… Il l’avait vu des milliers de fois dans la foule, l’appelant… Dans des rêves sans queue ni tête… Des rêves qui prenaient l’allure de cauchemars car après tout il ne faisait que refléter avec plus de force encore le vide qui s’était emparé de lui…

Et pourtant… Il ne pouvait y avoir de doutes…

Jean…

La douleur engendrée par l’apposition du tissu gorgé de désinfectant lui fit se mordre la lèvre inférieure en plissant ses yeux clos. La jeune femme essayait d’y aller le plus délicatement possible, mais les blessures étaient tellement à vif et quelques peu infectées que la sensation de brûlure s’accentuait de plus en plus à chaque fois que le tissu touchait une plaie. Son corps tout entier la faisait souffrir, elle avait l’impression d’être une poupée de porcelaine brisée en milles morceaux. Une gracieuse petite poupée ayant tout perdu : charme, grâce, volonté, vie. Elle avait l’impression de n’être plus que l’ombre d’elle-même, ce voyage aux portes de la mort avait été une expérience absolument affreuse et traumatisante et à présent, elle ne savait plus où elle en était, le jour, l’heure, la date, elle n’en avait aucunes idées. Et d’ailleurs, voulait elle vraiment le savoir ? Apprendre ce qu’elle ne voulait pas apprendre. La possibilité que des années soient passées depuis l’accident, que ses amis soient morts… non elle ne voulait pas se retrouver face à cette vérité qui commençait à prendre une place de plus en plus importante dans sa tête.

Les yeux fermés, elle essayait de rester calme, priant pour continuer d’entendre ce brouhaha si familier, essayant de ne pas sombrer dans la panique qui s’emparait d’elle et qui risquait de se révéler dangereuse si elle perdait le contrôle de la situation. Elle le sentait en elle, une force, un pouvoir grandissant, tout le temps, à chaques instants depuis si longtemps qu’elle ne pouvait se rappeler le moment exact, le déclencheur. La seule chose qu’elle savait était qu’elle ne devait pas se laisser aller, rester maître de soi à tout prix. Elle y arrivait jusque là, les voix dans sa tête continuaient à bourdonner, certaines plus fortes que d’autres, sans doute une personne proche, elle ne cherchait pas à le savoir, sachant très bien qu’elle était trop faible pour garder le contrôle de la situation. Elle venait juste d’avoir repris le contrôle de son esprit, elle le sentait, et elle ne voulait pas risquer de couler une nouvelle fois.

Une autre voix, si forte, si désespérée qu’elle lui fit rouvrir les yeux d’un coup. Semblable à un hurlement, empreinte de tristesse, sans ce concentrer elle sentait l’esprit se rapprocher. Rien qu’une seule seconde de concentration et elle aurait su à qui cet esprit appartenait. Rien qu’une seconde c’était si peu se disait elle, ayant envie d’écouter cette voix qui l’incitait à assouvir une curiosité grandissante. Si peu mais suffisant pour déclencher un malheur.

Ses pensées furent coupées par la porte qui se mit à coulisser pour laisser entrer un homme brun au nez ensanglanté qui soutenait une paire de lunettes aux verres rouges. Celui qu’elle attendait depuis si longtemps, il était enfin là. Le choc se lisait sur son visage de même qu’il se lisait sur le visage de la jeune femme rousse. La bouche entre-ouverte, elle ne savait quoi dire. C’était bien lui. Comme par magie elle oublia tout autour d’eux, ses blessures, son esprit brisé, son corps meurtri. Plus rien ne comptait, apart lui…Lui face à elle. Elle était redevenue Jean.

« Scott… »

Dit elle dans un souffle, le nom de celui qu’elle aimait étant sorti de sa bouche instinctivement. Elle le sentait prêt à défaillir, derrière ses verres de quartz rubis, elle savait trouver ses yeux azur, elle plongea son regard dedans et comme mue par une force surhumaine elle se leva pour se diriger vers cet homme qui était toute sa vie.

Alors que son regard, bien que voilé derrière une barrière rouge, accroché celui de la jeune femme, il sentit son cœur manquer un battement. Depuis qu’elle avait disparu, recouverte par les eaux en tentant de les sauver tous il avait toujours au fond de lui nourri l’espoir qu’elle n’était pas morte et qu’elle lui reviendrait sans jamais vraiment y croire. C’était en quelque sorte le seul moyen qu’il avait trouvé pour la garder auprès de lui, garder ses souvenirs intacts.

Car il avait beau eu lutter, les semaines passant son oreiller avait perdu son odeur, cette odeur à la fois si sensuelle et douce, si femme. Il voyait son visage avec moins de netteté qu’auparavant, il avait du mal à se souvenir de l’intonation de sa voix, de ses petites mimiques, tout ce qui faisait que Jean était Jean. Sa façon de marcher, de le regarder, de lui parler, la sensation qui l’étreignait quand il la serrait contre lui… Tous ces petits détails qui semblent tellement insignifiants mais qui prennent toute leur importance une fois l’être aimé disparu.

Il s’y était accrocher, avec amertume, avec colère, maudissant le destin qui les avaient séparés, maudissant son incapacité à continuer de respirer, manger, dormir, rire sans elle à ses côtés, de vivre tout simplement, maudissant sa faiblesse cruellement reflétée par tous les autres personnes qui lui étaient proches, Le Professeur, Ororoe et même Logan.

Et voilà que maintenant que tous espoirs semblaient perdus, qu’il avait le nez broyé et en sang à l’image de son cœur, qu’il avait décidé ne serait-ce que d’essayer de réfléchir à ce que Wolverine avait bien pu dire quelques instants plus tôt, elle était là. Là… Juste là… Comme si elle l’avait toujours été, comme si depuis le début elle l’attendait dans l’austère infirmerie, qu’elle attendait qu’il vienne enfin la chercher et l’emporte loin, bien loin de toute cette souffrance.

Ce fut elle qui la première réagit et se leva, une aura de peur, de souffrance, de détermination d’amour l’entourant. Tel l’ange revenu des ténèbres, elle avait vaincu l’ombre, le néant pour lui revenir et le prix de cette victoire se lisait sur son visage de poupée. Elle prononça son nom, simple murmure, simple souffle, comme si le fait même de parler lui était difficile et il sentit un frisson descendre le long de sa colonne vertébrale. C’était le même murmure qui ne l’avait pas lâché depuis tout ce temps.

Ce fut lui qui rompit l’espace qui se trouvait encore entre eux, en deux enjambés rapides. Son regard bien que dissimulé derrière des verres colorés ne pouvait ignorer l’état dans lequel elle se trouvait. Qui sait par quoi elle était passé avant d’enfin revenir chez eux.

« Oh mon dieu… »

Délicatement il l’attira à lui, comme si tout geste trop brusque aurait pu la briser en milles morceaux, telle une poupée de porcelaine, son corps épousant d’instinct celui de la jeune femme, comme si il avaient été faits l’un pour l’autre. Il l’emprisonna dans son étreinte, pour la sentir entière, de peur qu’elle ne disparaisse, de peur que ce ne soit encore qu’une illusion et qu’il ne se retrouve seul une fois de plus, une fois de trop…

« Jean… »

Toujours avec autant de douceur, il laissa glisser ses doigts dans ses cheveux couleur feu, apposant son front brûlant contre celui de la jeune femme, cherchant un regard qu’il sentait presque perdu. Il la soutenait, prêt à réagir à la moindre défaillance de sa part et il n’y avait plus en lui aucune trace de souffrance, si ce n’est celle qu’il éprouvait suite au coup qu’il avait reçu.

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