Histoire : Finley Callahan naquit à la Nouvelle Orléans. Son histoire commence réellement, non pas dans cette ville, mais quelques années plus tard, à proximité de New Iberia, au cœur de la Louisiane française, en pays Cajun. Il avait alors cinq ans…
Par une soirée du mois d’août, le ciel avait subitement viré au noir et le bayou se retrouvé très vite noyé sous des trombes d’eau. Les grosses gouttes s’écrasaient sur le toit de la maison en bois, elle balayait les jeunes pousses de canne à sucre et faisaient danser les longues tiges des saules pleureurs. Derrière la fenêtre, le jeune Finley observait le ponton qui disparaissait dans les lames de pluie. Les marais et les lacs se retrouvèrent très vite gorgés d’eau. C’était une soirée ordinaire, comme ce petit bonhomme de cinq ans avait appris à les connaître depuis qu’il vivait dans ce lieu. Quelques minutes plus tard, l’orage se calma et l’eau des marécages redevint sombre. Sa mère l’appela pour qu’il prenne sa douche et le garçon détourna son regard de ce spectacle.
Quelques heures plus tard, la nuit était tombée mais l’air était redevenu lourd à cause de l’orage qu’il y avait eu. La maison était silencieuse et plongée dans la pénombre. Le cri d’un crapaud retentit au dehors, réveillant le jeune garçon qui se leva, les yeux embués de sommeil. Il vint s’asseoir sur le bord du ponton, ses jambes se balançant lentement au-dessus de l’eau. Le ciel n’était plus orageux mais éclairé par la douce lueur de la lune. Le lendemain, il irait à la pêche, c’était décidé. Il voulait ramener des perches à sa maman pour qu’elle les fasse pour le dîner. Tout était simple dans la tête de cet enfant de cinq ans, il voulait aller pêcher mais ne se posait pas la question de savoir si sa mère le laisserait faire ou non.
Finley s’allongea et ferma les yeux. Il écoutait les bruits familiers du bayou, il commençait lentement à se laisser envahir par la douce torpeur menant au sommeil. Mais un bruit étranger à ceux qu’il avait l’habitude d’entendre le fit rouvrir les yeux brusquement. Il se redressa et vit des lueurs mouvantes qui s’avançaient au loin sur la route. Un véhicule approchait à cette heure tardive de la nuit. Il cligna des yeux pour s’assurer que ce n’était pas un rêve, le véhicule s’approchait toujours. Le jeune garçon se leva et se dirigea en courant vers la maison. Sur le seuil, il percuta quelque chose. Il fut soulevé du sol et se retrouva soudain face au visage si familier de sa mère, les yeux dans les yeux. Il pouvait sentir son souffle chaud sur ses joues. La voix de la jeune femme était tendue, Finn décelait de la nervosité dans son intonation lorsqu’elle lui parla. Il se rendait compte qu’elle faisait des efforts pour ne pas l’effrayer.
- « Finn, écoute-moi bien. Tu cours tout de suite chez ton oncle Ross, le plus vite que tu peux. Et tu ne te retournes pas. »
La jeune femme le serra très fort contre elle puis l’embrassa avant de le reposer à terre, l’incitant à partir. Finley courut aussi vite qu’il le put jusqu’au petit sentier qui menait jusqu’à la maison de son oncle Ross qui n’était en fait que le meilleur ami de sa mère et le parrain du petit garçon. Mais il n’emprunta pas le sentier. Il s’arrêta au talus de pacaniers qui dominait la maison à quelques mètres de là et se cacha parmi les feuilles. Il ne voulait pas partir, pas sans sa mère. Il ne comprenait pas pourquoi elle voulait qu’il s’en aille sans elle.
La voiture s’approchait à vive allure, elle s’arrêta très vite dans la cour devant la maison, dans un crissement de pneus. Sur la plate forme de la voiture, deux hommes descendirent alors que deux autres sortaient de la cabine. Soudain, il y eut une lueur, un des hommes venait d’allumer une torche. Finn distingua alors le métal de fusils que tenaient les autres hommes. L’un des hommes armés braqua son arme en direction de sa mère qui se tenait droite devant eux. Un autre alluma une nouvelle torche et se dirigea vers la maison. Le jeune garçon poussa un hurlement silencieux quand la maison s’embrasa. Les hommes se mirent à parler, plutôt à crier contre la jeune femme. Quelques mots parvenaient jusqu’aux oreilles du garçon mais il n’en comprenait pas le sens.
- « Sale mutante… »
- « … Tu ne mérites pas de vivre… «
- « … Monstre ! »
Un coup de feu partit. Finn qui se trouvait à quelques mètres de la scène, caché, n’en revint pas de ce qui se passa sous ses yeux. Juste avant que le coup ne parte, sa mère avait tendu sa main en direction des hommes. La balle s’était arrêtée dans les airs, par quel phénomène ? Un autre coup partit puis un autre. Si la jeune femme arriva à stopper la seconde balle, elle ne fut pas assez rapide pour la troisième qui la toucha. Nicole Callahan s’écroula au sol en même temps que les deux balles qu’elle avait arrêtées avec son pouvoir de télékinésie. Quasiment au même moment, Finley poussa un hurlement sortit du talus de pacaniers pour courir vers sa mère. Les hommes qui ne s’attendaient pas à la présence de l’enfant dans les parages, ne réagirent pas alors que le bambin s’écroulait en pleurs sur le corps inerte de Nicole.
C’est alors que le don de Finley se déclencha. Ses petites mains potelées étaient posées sur la plaie provoquée par la balle. Le sang coulait à flot et il tentait tant bien que mal de l’arrêter en vain lorsqu’une faible lueur se mit à apparaître sous ses paumes. Une douce chaleur se propagea sur la blessure de Nicole et le saignement commença à se ralentir jusqu’à arrêter. Les larmes coulant le long de ses joues, le regard émeraude de Finn passait de sa mère à la blessure qu’il soignait sans savoir comment il accomplissait ce miracle.
Mais le miracle fut de courte durée. Les quatre hommes s’étaient repris, et avant que le jeune garçon ne finisse de soigner sa mère, l’un deux le frappa, assez fortement et il s’écroula aux côtés de Nicole. Il vit la plaie de la jeune femme recommencer à saigner avant de sombrer dans l’inconscience. Bien des années plus tard, devenu adulte, Finley Callahan verrait toujours dans ses cauchemars cette scène, il entendrait toujours dans son sommeil les cris des hommes, son propre cri et le bruit de ses sanglots alors qu’il tentait de sauver sa mère.
A la suite de ce meurtre qui demeurait sans explication pour un enfant de cinq ans, Finn se réveilla quelques heures plus tard dans un lit aux draps blancs. Cette chambre dans laquelle il se trouvait, il la connaissait, c’était celle de son oncle Ross. Etait-ce donc un rêve qu’il venait de faire ? Lorsque le jeune garçon se redressa au milieu du lit, le regard triste et soucieux qu’il rencontra le ramena à la réalité. Il ne vivait pas un rêve. Ce qu’il pensait être un cauchemar, c’était bien ce qu’il avait vécu dans la nuit.
- « Oncle Ross… Est-ce que je suis un monstre aussi…? »
Aussitôt ces quelques mots prononcés, Finn éclata en sanglots dans les bras de son oncle. La mort de sa seule parente, la découverte de son don, c’était trop pour ce jeune garçon. Il n’avait pas été préparé à tout ça, il n’avait pas demandé à être différent des autres enfants de son âge. Tout ce qu’il voulait, c’était qu’on lui rende sa maman. Mais la voix douce de Nicole ne viendrait plus jamais accompagner les bruits si familiers du bayou. Il n’aurait plus jamais l’impression que les tiges des saules pleureurs dansaient lentement, suivant le rythme des chansons douces qu’interprétait la jeune femme.
Ross décida de quitter New Iberia pour de préserver Finley. Le petit garçon lui avait raconté ce qu’il avait réussi à faire avant qu’un des hommes ne l’assomme, il fallait l’éloigner, repartir de zéro sinon ce même groupe de personnes n’allait pas tarder à s’en prendre à l’enfant. Le jeune homme emmena donc son filleul à la Nouvelle Orléans, là où il était né. Il devint son tuteur et fit tout pour que Finley reprenne une vie normale même si ce garçon n’était pas tout à fait comme les autres. Ce don, il l’avait en lui, même s’il tenta de l’oublier.
Un jour Finn rentrait de l’école lorsqu’il entendit un chien pleurer. Il avait sept ans, son parrain le laissait rentrer seul car l’école se trouvait à proximité de leur maison. Le garçon avait juste pour consigne de ne pas s’arrêter en route. Pourtant ce jour là, c’est ce qu’il fit. Ce chien qui pleurait attira son attention. Le bruit venait d’une petite ruelle assez sombre. Finn hésita quelques secondes avant de finalement se diriger vers ce chien pleurant, ne résistant pas à l’envie de pouvoir l’aider. Il le trouva quelques mètres plus loin, allongé derrière une poubelle. C’était un chien horrible, tout sale. Une de ses pattes était en sang, sans doute à cause d’une bagarre avec des chiens errants. Lorsqu’il vit l’enfant, le chien se mit à grogner. C’était tout ce qu’il pouvait faire, sa patte en sang l’empêchait de se redresser. Finn ne se préoccupa pas des grognements, il s’accroupit près du chien et sortit un mouchoir de sa poche pour lui mettre autour de sa patte. Mais alors qu’il s’approchait de celle-ci, le phénomène se produisit. Comme deux ans plus tôt quand il avait voulu sauver sa mère. Une lueur sortit de la paume de sa main alors qu’il s’approchait de la blessure du chien. Une chaleur envahit l’animal et quelques secondes après, la plaie arrêta de saigner et se referma. Il pouvait guérir mais ne savait pas comment utiliser ce don pour le moment.
A partir de ce jour là, Finn s’exerça du mieux qu’il put pour contrôler son pouvoir. S’il le cachait aux hommes, il acceptait de l’utiliser sur les animaux. Très vite, la maison de Ross se transforma en cabinet vétérinaire. Finn ramenait des chiens, des chats, des oiseaux, tous les animaux blessés qu’il rencontrait pour les soigner chez son oncle. Ross le laissait faire même s’il tentait tout de même de préserver son filleul en ayant de longues discussions avec lui sur la nature de son pouvoir et sur les conséquences que cela pourrait avoir si certaines personnes mal attentionnées apprenaient qu’il le possédait.
Quelques années plus tard, à l’adolescence, Finn découvrit une nouvelle forme dans sa mutation. Son don qu’il utilisait pour guérir, il pouvait également l’utiliser pour lui, pour se protéger durant un certain temps. Il en parla ouvertement à Ross aussitôt qu’il le découvrit. Cette fois, ce fut lui qui décida d’éviter l’utilisation intempestive de cette nouvelle facette de ses pouvoirs. Il voulait vivre normalement, poursuivre ses études comme tout le monde. Il avait un équilibre entre sa vie à la Nouvelle Orléans, Ross et ses études. A la fin du lycée, Finn s’inscrivit dans une petite université à New York. Il choisit cette faculté et non une à la Nouvelle Orléans car le jeune homme désirait acquérir une certaine confiance pour entamer sa vie d’adulte. S’il restait près de Ross, il ne pourrait pas le faire, il devait prendre son indépendance et vivre sa propre vie.
Finn était âgé de tout juste dix huit ans lorsqu’il débarqua à New York. Il se trouva un petit appartement dans le quartier de Chinatown ainsi qu’un petit boulot de coursiers pour l’aider à subvenir à ses besoins. Il savait que Ross l’aiderait s’il demandait de l’aide mais refusait d’abuser de la gentillesse de son oncle qui avait toujours été présent pour lui jusque là.
Au cours des deux années qui suivirent son installation à New York, Finley entendit parler de deux groupes de mutants qui poursuivaient des idéologies différentes. Il effectua quelques recherches pour en apprendre un peu plus sur eux, non par envie de les rejoindre mais par simple curiosité. Il savait qu’il n’était pas le seul à avoir un don, il était simplement curieux d’apprendre quels pouvaient bien être les pouvoirs de toutes ces personnes qui n’étaient pas, tout comme lui, des gens ordinaires.
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